On parle de plus en plus du travail qui tue, de ces travailleurs qui sont aliénés par leur travail, qui à cause de trop de pressions finissent en dépression, en burn-out voir dans des cas plus graves recourent au suicide. Les travailleurs sont toujours plus soumis à des pressions dans leur entreprise, qu’elles soient liées à la charge de travail, au stress engendré par les exigences de productivité et de rentabilité, à la « flexibilité », et le travail sur appel, ou aux conflits induits par la subordination hiérarchique comme le mobbing ou le harcèlement moral et sexuel.
Ces dégradations dans les conditions de travail reposent souvent sur la peur des salarié.e.s. On leur a fait croire que s’ils.elles dénoncent leurs conditions de travail, elles.ils risquent de perdre leur emploi et que retrouver du travail n’est pas chose facile. Les travailleurs.ses se sentent alors pris.e.s dans un étau, et n’osent parler de ce qu’ils.elles vivent comme souffrances psychosomatiques ou souffrances physiques, car ils.elles savent qu’ils.elles doivent être toujours plus performant.e.s. Les salarié.e.s en viennent à mettre leur santé en péril en continuant à travailler dans la pénibilité, voire dans la douleur.
En 2015, selon les chiffres de l’OFS, 6,8% des personnes se déclaraient victimes de mobbing contre 4,4 % en 2002. Nous savons que ces chiffres ne correspondent pas à la réalité et sont largement sous-évalués. Car, un grand nombre de travailleurs.ses n’osent pas montrer leur mal-être et dévoiler les pressions qu’ils subissent et n’ose pas non plus se mettre en arrêt maladie. Et pour cause, nous savons que les entreprises peuvent facilement licencier une personne qui serait en long arrêt maladie. Il leur suffit de jouer sur les périodes de protection ou de licencier au retour de maladie, et cela sans aucune indemnité de départ. Le tout légalement. De plus, certains employeurs et certaines entreprises qui seraient à l’origine de ces mauvaises conditions de travail ne sont pas tenus de payer les frais médicaux engendrés. Ces travailleurs vivent ainsi une double peine : celle d’être malades et celle de passer intégralement à la caisse. On peut se demander s’il ne serait pas temps de trouver un nouveau mécanisme de financement où les employeurs à l’origine de mauvaises conditions de travail prendraient à leur charge les coûts liés à la dégradation de la santé de leurs ernployé.e.s.
La Loi fédérale sur le travail dans l’industrie, l’artisanat et le commerce, à son article 6, précise : « Pour protéger la santé des travailleurs, l’employeur est tenu de prendre toutes les mesures dont l’expérience a démontré la nécessité, que l’état de la technique permet d’appliquer et qui sont adaptées aux conditions d’exploitation de l’entreprise. Il doit en outre prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger l’intégrité personnelle des travailleurs. » Nous savons dans les faits que cela est loin d’être le cas puisque dans bien des situations difficiles, l’entreprise employeur avec son organisation du travail, est elle-même la source du mal-être de ses employé.e.s.
Un parallèle intéressant peut être fait avec le danger de l’amiante. Il a fallu plusieurs décennies pour que ses dangers et les conséquences encoures par les travailleurs ne soient prises en considération. Faudra-t-il attendre autant de décennies pour qu’il soit admis que la souffrance au travail est un problème majeur de santé publique ? On peut imaginer que dans des moments de grande détresse, certain.e.s travailleurs.euses vont, soit consommer des psychotropes pour tenir le coup ou pour s’évader de leurs souffrances quotidiennes dues à leur travail, soit vont en venir à mettre fin à leur vie.
Le soussigné pose donc les questions suivantes au Conseil d’État :
1. Le Conseil d’Etat reconnaît-il qu’un certain nombre de maladies psychosomatiques qui se développent chez des travailleurs sont intimement liées aux conditions et au Stress dûs au travail qu’ils occupent ?
2. Le Conseil d’Etat reconnaît-il le burn-out comme étant une maladie du travail ?
3. Le Conseil d’État a-t-il une stratégie pour aider les personnes à se reconstruire suite à un burn-out lié à leur travail ?
4. Le Conseil d’Etat peut-il estimer les implications financières de la souffrance au travail sur les comptes Vaudois ?
Interpellation déposée au Grand Conseil vaudois par notre député Vincent Keller