À qui sert la bonne santé économique?

L’actualité va vite, et avec elle certaines bonnes idées passent inaperçues. C’est le cas avec l’annonce de la Conférence
suisse des institutions d’action sociale (CSIAS), qui a proposé une solution intéressante pour certain.e.s chômeur.euse.s. Dans un contexte économique favorable, comme cela semble être le cas dans le canton de Vaud, les bonnes idées devraient faire l’objet d’un examen approfondi.

Les chômeurs et chômeuses âgé.e.s ont peu de chance de retrouver un travail stable et de parvenir à l’âge de la retraite en gardant un niveau de vie adéquat. Ce d’autant que l’âge de la retraite tend à augmenter. Parvenu.e.s à la fin de leur délai cadre, ils et elles changent aussi de régime: de celui de l’emploi, ils et elles passent à celui de la prévoyance sociale, socle minimal soumis à conditions.

Le 22 février dernier, la CSIAS a proposé que les chômeurs et les chômeuses de plus de 55 ans puissent rester au chômage
jusqu’à l’âge de la retraite. Selon cette association professionnelle nationale, cette question ne devrait pas reposer
uniquement sur l’aide sociale: «Il s’agit d’une mission qui incombe à l’ensemble de la société, à assumer conjointement par les milieux politiques et économiques à l’aide de mesures contraignantes.»
Parmi ces mesures, elle suggère que les milieux économiques fassent l’objet de mesures incitatives pour favoriser le retour à l’emploi de ces personnes. Les chômeur. euses.s âgé.e.s disposent d’une solide expérience, d’une formation et d’une longue pratique professionnelle. Celles-ci peuvent apporter au marché du travail une stabilité, des compétences et un engagement qui profitera à leur employeur et à la collectivité.

Une telle proposition permet de poser un regard différent sur les personnes au chômage en restant dans le domaine de l’emploi, elles révèlent les lacunes de ce dernier et font moins figure de «surnuméraires» que lorsqu’elles vivent dans un régime d’assistance. Le service de l’emploi est plus à même de résoudre leur situation, qui résulte de problèmes économiques
et non sociaux.

Par ailleurs, le 26 avril dernier, le Canton de Vaud a affiché sa bonne santé économique. Des perspectives 2018 réjouissantes, une hausse attendue du PIB vaudois à 2,5% et un fort recul du taux de chômage à 4,1%. Plutôt que de constituer des réserves pour atténuer les futurs effets de la prochaine réforme de la fiscalité des entreprises, ne pourrait-on pas aussi faire bénéficier de cette bonne santé ceux qui, en travaillant, y ont contribué ces dernières décennies?
Des solutions existent pour réduire le risque de précarité des travailleur.euse.s âgé.e.s. Ces solutions nécessitent d’englober les questions sociales dans les perspectives économiques, ce qui revient à envisager le travail comme une dimension fondamentale de la citoyenneté et comme un droit.

Karine Clerc, paru dans le 24Heures