Imposer les successions de plus de deux millions, et apporter ainsi un financement supplémentaire à l’AVS : voilà la proposition sur laquelle nous voterons le 14 juin prochain. Le POP & Gauche En Mouvement peut souscrire à ces deux principes – ce qui n’empêche pas les critiques sur les détails.

 

Financer l’AVS

La dernière amélioration substantielle de l’Assurance Vieillesse et Survivants (AVS) date de 1978 ; et depuis une quinzaine d’années, les autorités cherchent plutôt à limer les prestations. La 11e réforme de l’AVS a été refusée par le peuple en 2004, et à nouveau en 2010 par le Parlement. Le Conseil Fédéral ressort la même idée avec le paquet Prévoyance 2020. Au programme, entre autres : un plafond des contributions de la Confédération à l’AVS, et l’institution d’un frein à l’endettement. Un moyen d’appauvrir l’AVS, qui promet de futures coupes dans les rentes.

L’initiative propose d’inverser la tendance, avec un financement supplémentaire par un impôt fédéral sur les successions.

 

Imposer les successions

En Suisse, l’impôt sur les successions est laissé à l’appréciation des cantons. Et ils se sont lancés dans une sous-enchère, entraînant en 10 ans une baisse d’un tiers des recettes de l’impôt successoral : 1.5 milliards pour l’année 1999, et moins d’un milliard en 2010.

Et ne dramatisons pas, l’initiative ne propose pas d’abolir l’héritage : pour chaque succession, elle n’impose que la somme supérieure à 2 millions. Des aménagements supplémentaires sont prévus pour les entreprises et les exploitations agricoles. Largement de quoi transmettre une maison familiale. En outre, la part d’héritage du veuf ou de la veuve est dispensée de l’impôt, comme dans le système actuel. Le projet est si prudent que le Conseil Fédéral annonce une baisse de l’impôt sur les successions par rapport à l’actuelle loi vaudoise…

Au-delà d’un certain montant, les héritages méritent d’être taxés, parce qu’ils constituent un puissant moyen pour maintenir et accroître les inégalités sociales. Selon les chiffres fédéraux, la fortune en Suisse est de moins en moins bien répartie depuis le début des années 1990. Au sein de la population, les 1.09% les plus riches possédaient 30% de la fortune en 1991, contre plus de 40% en 2009. Une partie de cette fortune peut aller aux tâches publiques, plutôt que de revenir aux héritiers.

Pour limiter les pertes fiscales des cantons, l’initiative prévoit qu’un tiers des revenus du nouvel impôt leur sera reversé. Leur perte serait au maximum de 450 millions par an, soit moins de 1% de leurs recettes fiscales. Un montant à mettre en balance avec les recettes pour l’AVS, de 1.1 à 2 milliards, soit 2.7 à 4.9% des revenus 2013.

 

Les critiques

Les initiants ont fixé un maximum de détails dans le texte que nous voterons le 14 juin. A nos yeux, certains points n’étaient pas nécessaires. Au contraire, le POP & Gauche En Mouvement aurait souhaité plus de garanties sur un autre point : que l’impôt sur les successions apporte réellement un revenu supplémentaire à l’AVS. Actuellement, les ressources de l’AVS sont principalement les cotisations, et une participation de la Confédération (fixée en gros à 19.55% des dépenses de l’assurance). Il faudra donc que l’impôt successoral vienne en plus de la contribution fédérale actuelle, et ne soit pas simplement inclus dans la participation actuelle. Mais pour ce point, il sera encore temps d’insister si l’initiative est acceptée le 14 juin.

 

David Payot