Ce n’est pas une loi sur l’asile, c’est une loi de création de sous-hommes, une loi de mépris des plus pauvres de la planète. C’est une loi faite par un milliardaire pour des milliardaires qui ont sans cesse besoin de clandestins corvéables à merci dans la société, afin qu’ils puissent jouer sur les divisions humaines, sur les instincts les plus bas qui abolissent toute notion de solidarité humaine.

Avec cette loi, la Suisse – opulente, parmi les pays les plus riches de la planète – prend des mesures des plus coercitives, que même les pays les plus pauvres de la planète n’oseraient prendre. Sur cette bonne vieille terre, ce sont essentiellement les pauvres, les pays les plus pauvres qui font les efforts les plus importants pour accueillir les déracinés de toutes sortes, qu’ils soient exilés pour des raisons politiques, étatiques ou pour des raisons de politique économique scandaleusement capitaliste.

C’est une honte sur le plan de la morale, que le pays qui prétend être une terre d’accueil ou être le gardien de la fameuse Convention de Genève relative au statut des réfugiés ose en venir à discuter d’articles de loi qui annulent toute possibilité d’asile dans le futur. Car c’est de cela qu’il s’agit, purement et simplement. Cette loi relèverait du comique troupier si elle ne concernait, dans leur chair et dans leur sang, des milliers d’hommes et de femmes, vraisemblablement les plus courageux, qui ont cet instinct de fuir, de vouloir faire vivre une famille, de croire à un minimum d’avenir dans ce gigantesque charnier que le système économique est en train de produire.

Prétendre, sans rire, qu’on prononcera une décision de non-entrée en matière à l’égard de tous ceux qui sont passés par un pays sûr, c’est du scandale absolu ! Cela signifie qu’il n’y a purement et simplement plus de possibilités de rejoindre par la voie terrestre notre pays, ce trou noir au coeur de l’Europe en construction. En 2003, sur 20 800 demandeurs d’asile, seuls 423 sont arrivés par les airs.

Cette loi transforme le système des comptes de sûretés, dont l’Office fédéral des réfugiés n’a jamais assuré la gestion, en des prélèvements fixes non remboursables sur tous les salaires des requérants, et jusqu’à concurrence de 12 000 francs. Ce n’est rien de plus qu’une taxe sur l’asile, sans équivalent européen.

Sur le plan du droit, oser proposer de bâcler les procédures de décision pour confier la décision à un collège d’un juge ! Où est-ce qu’on a entendu ça sur le plan du droit ?

Tout cela est indigne de notre pays. Ce projet dénote un aveuglement total quant aux nécessités humanitaires.
Et ne parlons pas des nécessités démographiques de notre pays ! Pour trois Suisses actifs entre 20 et 64 ans, nous avons aujourd’hui presque un Suisse ayant atteint l’âge de la retraite. Globalement, chez les étrangers, nous avons une proportion de dix actifs pour un étranger à la retraite. En 2030, si tout va bien, l’effectif des Suisses actifs et des retraités va s’équilibrer. Il n’y a pas besoin d’être un grand prophète pour déclarer que depuis maintenant, c’est entre 120 000 et 200 000 étrangers qui devraient rejoindre notre pays pour stabiliser le nombre des actifs, sachant qu’il y a entre 70 000 et 100 000 étrangers qui quittent la Suisse chaque année. Et parmi eux, il devrait bien y avoir des réfugiés’

Cette planète est à feu et à sang à cause de ministres et de décideurs économiques qui ont fait de cette planète un gigantesque marché pour le profit de quelques multinationales. Ils pouvent ériger toutes les forteresses qu’ils veulent, les pauvres de cette planète l’assiégeront un jour. L’honneur de la Suisse humanitaire, l’honneur de la Suisse des Dunant, des Grüninger, ce serait qu’elle soit aujourd’hui la plus audacieuse en matière de droit d’asile, de sécurité du droit d’asile, de respect des droits humains, d’aide au développement. Par exemple, à hauteur de 1 pour cent du produit intérieur brut. l’honneur de la Suisse serait aujourd’hui de décréter un moratoire unilatéral sur les ventes d’armes dans le monde et de décréter par exemple une taxe Tobin unilatérale pour ristourner aux pays pauvres tout ce que les capitalistes de cette planète ont spolié: 45 milliards de francs. Il faudrait en effet 45 milliards de francs seulement, c’est-à-dire 10 pour cent des sommes engagées dans la guerre d’Irak, pour offrir le minimum vital pour les affamés de ce monde. Quelle immensité, et pourtant quelle paille!

A Gauche toute ! vous invite à voter NON à cette afin que notre pays puisse encore se regarder dans un miroir dans les années à venir.

Josef Zisyadis