Le Parti Ouvrier et Populaire a pris connaissance avec consternation du décès d’un adolescent de 17 ans à Lausanne dans la nuit du samedi 24 au dimanche 25 août, après avoir perdu le contrôle d’un scooter, alors qu’il était suivi par la police. En un seul été, deux mineurs sont décédés à la suite de courses-poursuites policières. « Ce constat d’échec collectif est insupportable. Nous pensons d’abord aux familles et aux proches touchés par ces drames et leur adressons nos condoléances, ainsi que toute notre solidarité ». En tant qu’acteurs de la société civile, partis politiques et institutions, il est urgent d’engager une réflexion sur les situations qui nécessitent une course-poursuite, et à plus large échelle sur le type de sanctions à déployer en cas de délit mineur (conduite sans permis et casque, conduite d’un deux-roues volé). Dans tous les cas, il est exclu dans notre pays qu’elles débouchent sur la mort d’un individu.
« Nous considérons que la police est un service public essentiel, la sécurité figurant parmi les élément indispensables pour garantir la vie en société. » D’une part, la lutte contre la criminalité ne justifie en aucun cas que la police et la chaîne pénale se trouvent au-dessus des lois. D’autre part, le travail policier ne doit pas se centrer vers les infractions « faciles à verbaliser », mais vers celles qui impactent la vie de toute la population, et des plus précaires en particulier. Les violences sexistes, les actes haineux à caractère raciste, homophobe, les abus de détresse en constituent des exemples criants et méritent un personnel formé, bien coordonné, et une fois de plus, irréprochable sur le plan pratique et moral.
C’est précisément pour cette raison que nous affirmons que des réformes urgentes sont nécessaires. Nous avons pris acte de la volonté de la Municipalité de Lausanne d’opérer des réformes au sein de la police. Nous l’encourageons et poursuivons : « les représentants de la loi incarnent l’État et la collectivité, ils se doivent donc d’être exemplaires ». « Nous condamnons toute disproportion dans les interventions ou actes discriminatoires émanant des services de police. » Nous demandons la création d’un organe public de surveillance et d’enquête indépendant, totalement externe aux services cantonaux. Nous voulons également : une instance indépendante de plainte selon les recommandations d’Amnesty International, une remise à jour du comité d’éthique. La formation des agents doit être renforcée et allongée, à la fois sur le plan pratique — appréhension de suspects, réduction des risques, maîtrise des armes et des moyens non létaux, premiers secours — que sur le plan théorique — psychologie, droit et déontologie. Le contenu de la formation doit être ajustée aux activités d’une police urbaine et aux besoin des victimes, de même qu’être attentive à mettre en place des outils de prévention du racisme systémique. En cas de manquement à ce devoir d’exemplarité, l’interdiction d’exercer, le renvoi et les poursuites pénales n’ont pas à être tabous.
S’il est urgent d’agir contre les brebis galeuses, le problème est aussi structurel. Comme pour l’ensemble des services publics, le manque de moyens est criant. Dans un contexte économique austéritaire, les agents de la police, comme tout autre fonctionnaire, peuvent être mis en difficultés, soumis à des situations d’urgences, des injonctions contradictions, sans préparation ni appui suffisants pour répondre aux plus complexes d’entres elles. Il faut renforcer une police de proximité : investir dans les effectifs de police, dans l’ouverture de postes de correspondants de jour et de nuit, rouvrir des antennes dans les quartiers populaires. Une police intégrée à son environnement, connue et reconnue par les habitants, qui travaille en coopération avec la population.
Car la question de la sécurité est bien réelle. « L’insécurité touche d’abord les classes populaires. Ce sont elles qui subissent la disparition de tous les services publics dans leurs quartiers. » Ce sont elles qui sont les premières victimes des cambriolages, des rixes et des trafics, et ce sont leurs enfants qui sont les plus exposés aux tentations du deal et aux ravages de l’addiction : bien souvent, les problèmes se déroulent en bas de chez elles. Et pour ces mêmes classes populaires, la violence policière et l’arbitraire s’ajoutent comme une double peine. Elles se retrouvent coincées entre une insécurité croissante et des institutions qui les protègent mal et qui, parfois les ciblent davantage.
C’est pour cela que nous affirmons qu’une politique purement sécuritaire est une impasse. Une véritable politique de sécurité pour la majorité sociale passe par un investissement massif dans les quartiers : travailleurs sociaux de proximité, logements abordables et de qualité, politiques d’insertion et de formation pour celles et ceux qui ont décroché du système scolaire, soutien au sport et aux maisons de quartier, gratuité de la culture. « L’État doit assumer son rôle : être présent là où les habitants en ont le plus besoin, et redonner aux quartiers populaires les moyens de vivre dignement. »
Enfin, nous ne pouvons pas ignorer les émeutes qui ont suivi la mort de ce jeune. Si la colère qui s’exprime est compréhensible au regard des nombreux morts liés à l’action de police ces dernières années, ces dégradations ne sont pas une solution. « Détruire les infrastructures de son propre quartier, brûler les transports publics ou attaquer les pompiers, c’est se tirer une balle dans le pied. » Ces actes affaiblissent les habitants eux-mêmes et donnent un argument rêvé à l’extrême droite, qui instrumentalise déjà ces images pour justifier une politique de répression et de division. Les poubelles brûlées, les équipements détériorés et les bus mis hors service sont payés par les impôts des habitants eux-mêmes.
Si le ras-le-bol face aux drames policiers est légitime, il doit être dirigé contre les véritables responsables : le gouvernement et les partis au pouvoir. C’est à cette jeunesse en colère que nous nous adressons : « il faut transformer cette rage en force politique, organiser la lutte collective pour défendre nos droits, notre sécurité, nos quartiers et notre dignité ». Le POP continuera à se battre pour une société égalitaire, où la police est exemplaire, où la justice sociale est réelle et où les classes populaires peuvent vivre dans la tranquillité et la dignité.

