Interpellation : César-Roux 5 : une rénovation pas très douce pour les locataires ?

Immeuble César-Roux 5 : la Municipalité est-elle bien certaine que les travaux de l’immeuble César-Roux 5 sont urgents, qu’ils justifient de résilier tous les baux des locataires ?
Que compte faire la Municipalité pour reloger les ancien·ne·s locataires de cet immeuble le temps des travaux et par la suite ? Que compte faire la Municipalité après les travaux pour garantir la mise sur le marché locatif de logements à loyer abordable dans cet immeuble ?

Lors d’une visite de leurs appartements qui a eu lieu le 18 février 2020, les locataires de l’immeuble César-Roux 5 (parcelle 2996) ont été informés que la Ville souhaitait faire des travaux intérieurs et extérieurs dans leur immeuble : installation d’un ascenseur, remplacement des vitrines du rez-de-chaussée, réaménagement du restaurant « Amici », rénovation des cuisines et salles de bain, mise aux normes des installations techniques, création d’un exutoire de fumée, d’une superstructure d’ascenseur, d’extraction et prises d’air en toiture (avis d’enquête No CAMAC 192176).

Pour engager ces travaux, tous les baux à loyer ont été résiliés, mettant à la porte tou·te·s les habitant·e·s.

Par son courrier du 21 juillet 2020, le Service du logement et des gérances de la Ville a annoncé aux locataires la résiliation de leurs baux à des dates diverses pour le début des travaux annoncé le 1er juillet 2021, tout en leur promettant une rencontre pour expliquer ces travaux et aider à retrouver un logement.

Suit un silence de 7 mois, malgré la demande d’une rencontre avec le Service du logement et des gérances, comme cela était proposé par ce même service.

Devant ce silence et contestant l’ampleur des rénovations, voire leur pertinence, et surtout la nécessité de la résiliation des baux pour effectuer ces travaux (certains appartements ne sont apparemment pas touchés par ces travaux), les locataires de César-Roux 5 se sont organisés collectivement pour déposer une opposition à leur expulsion. Ils et elles ont revendiqué leur droit légitime à pouvoir continuer à vivre dans leurs logements et à entretenir le réseau et les relations sociales qui s’y était développés au fil des décennies, dès lors qu’aucun intérêt prépondérant ne pouvait justifier leur mise à la porte, ou tout au moins, d’être aidés par le Service du logement pour être relogés pendant et après les travaux, comme ce service s’est engagé à le faire, mais sans y donner aucune suite.

Parallèlement, tout le quartier s’est mobilisé sous la forme d’une opposition à cette rénovation adressée à l’Office des permis de construire et comportant 157 signatures pour s’opposer à ce qui sera un chantier énorme dans ce quartier populaire nuisant au quotidien de ses habitants.

Lors de la résiliation, il a été promis que chacun des locataires serait relogé. Depuis, plus rien : ces personnes ne savent toujours pas où elles vont vivre prochainement, ni si même elles doivent chercher un appartement. Certaines se sont rendues au Service du logement, mais disent avoir été mal reçues.

Il est important de souligner que dans cet immeuble vivent des personnes et familles précaires dont la précarité a été accentuée par la crise, notamment une mère de famille qui s’occupe de sa mère vivant dans un appartement du même immeuble.

On peut se demander si, vu de la situation de précarité de ces personnes, cet immeuble n’aurait pas dû être désigné « logement social » depuis longtemps ?

Dans le contexte de crise économique, sociale et environnementale qui nous frappe, cette affaire met en évidence la nécessité et l’urgence de renforcer une politique publique d’acquisition et de développement de logements à loyers modérés ou abordables sur le territoire de la ville de Lausanne, pour tenter d’enrayer de telles dynamiques contre les locataires et pour garantir une rénovation écologique du parc locatif qui ne mette pas les locataires sur le carreau.

Soulignons que la crise que nous traversons encore rend très difficile un déménagement et la recherche d’un appartement.

Compte-tenu de l’implication de la Municipalité dans ce dossier, l’immeuble appartenant à la Ville, et de l’enjeu de ce dernier pour la politique du logement à Lausanne, le groupe Ensemble à Gauche souhaite adresser les questions suivantes à l’exécutif de la ville de Lausanne :

1) La Municipalité est-elle bien certaine que ces travaux soient si importants et urgents qu’ils justifient la mise à la porte de plusieurs locataires précaires en ces temps de crise ?

2)    La Municipalité envisage-t-elle de laisser certains locataires dans leur appartement pendant la durée des travaux, puisque ceux-ci ne touchent pas tous les appartements ? Si non, pour quelle raison ?

3)    Pourquoi la Municipalité ne propose-t-elle pas, après travaux, de reloger ces locataires dans leur ancien appartement rénové ? A-t-elle peur qu’i-elle-s ne puissent assumer les nouveaux loyers ?

4)    La Municipalité entend-elle soutenir les locataires expulsé·e·s, comme elle l’a promis, en leur trouvant des solutions de relogement ?

5)    La Municipalité maintiendra-t-elle des loyers modérés ou abordables dans cet immeuble, après travaux ?

6)    Dans la situation de crise que nous connaissons, la Municipalité ne pourrait pas envisager que la résiliation de ces locataires, et des locataires en général, soit gelée jusqu’à la fin de cette crise, à moins que leur logement qu’i-elle-s occupent comporte un danger évident ?

7)    Compte-tenu de cette affaire et au vu de la crise économique et sociale actuelle, la Municipalité n’estime-t-elle pas nécessaire d’intensifier encore plus sa politique sociale du logement, en menant une politique plus proactive d’acquisition de terrain et de développement de logements écologiques et d’utilité publique sur son territoire ?

Lausanne, le 14 septembre 2021

Déposé par Isabelle Bonillo, conseillère communale Lausanne