Intervention de Laura Manzoni au Conseil communal de Lausanne, le 24.11.2020

La survie des commerces lausannois nous tient toutes et tous à cœur, tous bord politiques confondus, d’autant plus en ces temps troublés et il est important de se poser ces questions et d’avoir un débat dans ce plénum. Ce qui distancie la gauche et la droite dans ce débat, sont les réponses que nous proposons.

Je me permets de vous rappeler que lors de la dernière séance de conseil, j’ai demandé l’urgence pour traiter l’interpellation que j’ai déposée il y a bientôt une année, qui questionne la municipalité quant à maintien du black Friday, qui propose des soldes et l’extension des horaires d’ouverture des commerces le dernier vendredi de novembre. Je vous rappelle également que la majorité de ce plénum a refusé l’urgence, alors qu’aux raisons écologiques, économiques et sociales, cette année s’ajoutent également des raisons sanitaires à se questionner sur la cohérence de telles pratiques génératrices d’assemblements massifs de personnes.

Ce soir, le conseil a accepté l’urgence pour traiter cette interpellation qui demande à la Municipalité d’autoriser des extensions supplémentaires des commerces avant Noël, afin de les soutenir.

Celle-ci est une fausse bonne idée pour plusieurs raisons :

–        Premièrement, sous prétexte d’aider les petits commerces, lorsqu’on lit attentivement votre interpellation, elle ne fait pas la différence entre petits et grandes enseignes. Notamment, la société coopérative des commerçants lausannois regroupe par exemple des entreprises familiales d’artisans boulangers-pâtissiers ou chocolatiers, mais aussi de grosses enseignes comme Manor, Globus ou H&M.

–        La survie des petits commerces ne dépend pas uniquement des horaires d’ouverture, mais surtout de la disponibilité des employés et de leur condition de travail. Il est connu que la libéralisation des horaires entraîne une forte tendance à la disparition des petits commerces au profit des grandes enseignes, qui peuvent plus facilement occuper du personnel pendant les heures supplémentaires. En plus, à surface de vente égale, les petits commerces emploient plus de personnel.

–        Concernant le personnel employé le soir et le dimanche, il faut souligner que ces salarié-e ne sont pas tous des étudiant-e-s sans charge familliale, mais la majorité sont les mêmes qui travaillent déjà la semaine et dont l’emploi constitue l’activité principale. La majorité de ces salarié-e-s sont des femmes, et nombreuses des mères de famille monoparentale, dont la situation familiale n’est pas compatible avec des horaires irréguliers. Sans compter que bon nombre des salariés appelés à travailler la nuit et le dimanche sont en situation précaire, ce qui les force à accepter n’importe quel emploi.

–        Les partis de gauche et les syndicats l’ont déjà démontré à plusieurs reprises, il est prouvé que l’extension des horaires d’ouverture n’est pas synonyme d’augmentation des profits. Un franc dépensé le dimanche ne peut pas l’être la semaine (et vice-versa). Le pouvoir d’achat des consommatrices et consommateurs ne devient pas extensible parce que les plages horaires pour le dépenser sont plus grandes. Notamment, je trouve limite l’argument qui voudrait que la majorité des lausannoises et lausannois passe son dimanche devant leur ordinateur à faire ses courses en ligne. Les besoins de la population n’ont pas changé, et j’espère que le rêve des lausannoises et lausannois n’est pas de consommer 7 jours sur 7 mais de pouvoir se reposer, se ressourcer et profiter des nombreuses alternatives qu’offre Lausanne, son paysage et son offre culturelle à ses habitant-e-s pour s’occuper le dimanche.

Pour soutenir les petits commerces, il vaudrait mieux sensibiliser et encourager la population à consommer local et si possible durable. Soutenir réellement les petits commerces et non pas les grosses enseignes. Arrêter d’autoriser des évènements destructeurs des goûts des consommateurs et des consommatrices, engendrant une surconsommation à outrance avec des prix cassés, promotions et fausses bonnes affaires en un temps limité.

Le groupe ensemble à gauche est, vous l’aurez deviné, fermement opposé à toute extension des horaires d’ouverture des commerces, que ce soit la nuit ou le dimanche.