Le débat public a été largement consacré, ces derniers mois et années, aux personnes sans domicile fixe venues temporairement d’Europe de l’Est, majoritairement de nationalité roumaine et se considérant généralement comme Rroms. La récente règlementation de la mendicité a été la réaction la plus débattue face à ce phénomène. Avec moins d’échos médiatiques, il semble que la police a également changé ses pratiques sur un autre plan. En effet, les Rroms et des personnes qui les côtoient évoquent de fréquentes amendes sanctionnant les personnes qui dorment dans leur voiture ou à la belle étoile.

Cette pratique se fonde probablement sur la phrase finale de l’article 36 du Règlement général de la Police de la Commune de Lausanne : « Il est interdit de camper sur la voie publique et ses abords ainsi que dans les forêts ». Selon les témoignages, les infractions sont l’occasion d’amendes de la police communale, qui réveillent parfois les personnes plusieurs fois dans la même nuit.

Sans logement en Suisse, les personnes amendées manquent d’alternatives : les lieux d’accueil d’urgence sont chroniquement surchargés. Les amendes ne paraissent pas dépendre directement du dérangement causé au voisinage ou des plaintes de celui-ci, et concernent aussi des lieux où les personnes sont assez discrètes. Faute d’alternative, ces personnes continuent donc à dormir sur la voie publique, ce qui amène à de nouvelles amendes majorées pour récidive. Faute de ressources suffisantes, les personnes ne paient souvent pas ces amendes, qui suivent donc une procédure relativement longue et complexe.

Le sens de cette pratique policière interroge à plusieurs égards. Premièrement, il n’est pas possible d’espérer que les personnes amendées trouvent toutes un lieu d’hébergement légal à Lausanne ou dans ses environs, vu la saturation des places d’accueil d’urgence. Deuxièmement, les amendes n’ont apparemment pas non plus dissuadé les personnes de venir en Suisse, dans l’espoir d’y trouver des revenus pour compléter leurs ressources insuffisantes.

Troisièmement, cette procédure paraît coûteuse en temps et frais de procédure. Dans le contexte de l’interdiction de la mendicité à Genève, l’émission RTS « Mise au Point » du 15 mai 2011 a mis en évidence l’inefficacité des amendes et le coût de la procédure pour les collectivités publiques. En réponse à une interpellation de la députée Anne Mahrer (26.05.2011, IUE 1208-A), le Conseil d’Etat Genevois a conclu à un coût de 1’821’600 francs pour les amendes prononcées entre le 01.01.2008 et le 07.06.2011.

En conséquence, nous prions la Municipalité de répondre aux questions suivantes :

1. Quelle est l’évolution du nombre d’amendes infligées à des personnes dormant sur la voie publique au cours de ces dernières années ?

2. Quel est usuellement le montant d’une telle amende, dans le cas d’une première contravention ou dans le cas d’une récidive ?

3. La police a-t-elle saisi de l’argent sur les personnes amendées, si oui dans quel contexte et avec quels résultats ?

4. La Municipalité a-t-elle incité les forces de police, d’une manière ou d’une autre à accroître les mises à l’amende de personnes dormant sur la voie publique au cours des dernières années ?

5. Quel est le coût de ces procédures pour la Commune de Lausanne (ressources de personnel et infrastructures, émoluments de tiers, frais postaux, etc.) ou pour d’autres collectivités publiques ?

6. Quels ont été les revenus consécutifs à ces amendes ?

7. Est-ce que des possibilités d’hébergement alternatives sont proposées aux personnes amendées sans domicile ?

8. La Municipalité dispose-t-elle d’indices la laissant penser que ces amendes ont modifié le comportement des personnes amendées ?

Lausanne, le 14 mai