| par Julien Sansonnens, opinion publiée dans « Le Temps » du 7 mars 2008Le statut d’icône autoproclamée du syndic de Lausanne et conseiller national, Daniel Brélaz, légitime-t-il qu’il n’oeuvre pas en faveur du programme sur lequel il a pourtant été élu ?
Il y a en effet quelque chose de choquant à l’entendre défendre à Grenoble les politiques qu’il combat à Lausanne, et cela au moment même où la population doit supporter comme chaque année les conséquences des particules fines dont Lausanne détient le record de concentration en Suisse. Faut-il attendre que les poussières atteignent les hauteurs de Montblesson ou s’infiltrent dans les salons feutrés du Palais fédéral pour que Daniel Brélaz prenne enfin les mesures volontaristes que les citadins attendent? N’a-t-il donc rien d’autre à proposer contre cette pollution que le lavage à grande eau des axes routiers ? Faudra-t-il que la population se contente encore longtemps des aimables et inoffensives « recommandations » que François Marthaler et le Conseil d’Etat édictent périodiquement? Entendre le syndic Vert soutenir en Isère des baisses de prix des transports publics alors que les tarifs des TL ne cessent d’augmenter avec sa bénédiction, relève de l’indécence. l’agglomération lausannoise est celle où l’on se déplace le plus en voiture; qu’attend Monsieur le Syndic pour mettre en oeuvre une réelle politique de modération du trafic automobile au centre-ville ? Qu’attend-il pour s’ engager en faveur de la gratuité des transports publics, une mesure à la fois sociale et écologique, qui fait ses preuves dans un nombre toujours plus important de villes ? A quand le développement des zones à 30km/h et la gratuité des parkings-relais en cas de pic de pollution’ M. Brélaz déclarait le 12 juin dans Le Temps que «nous ne pouvons pas mettre trop de moyens pour le vélo, qui concerne relativement peu de gens»: s’agissait-il d’un lapsus, ou c’est là sa vision de la mobilité douce ? Les contradictions qui caractérisent l’action politique de son parti ne s’arrêtent pas à la question des transports. En matière d’urbanisme et de logement également, la schizophrénie des Verts est patente. En qualifiant il y a quelques semaines les constructeurs de la maison de paille de « fumistes », le syndic pensait pouvoir enterrer durablement toute remise en cause de la politique municipale en la matière. Raté: la sympathie du public pour les projets alternatifs ne cesse d’augmenter, comme en témoigne l’affluence à la conférence donnée le 1er mars par l’architecte Werner Schmidt, à l’invitation de l’association de soutien à la maison de paille. Dans ce dossier, loin de l’ouverture dont il se réclame, M. Brélaz a choisi de criminaliser la contestation politique: jusqu’à quand va-t-il combattre – au coté du lobby de la construction – les projets de maisons écologiques, renouvelables, et bon marché? Au niveau social, le bilan de son action n’est guère plus convainquant. A propos des transports publics, que pense-t-il de la sous-dotation en personnel du futur M2? Au sein de la RATP parisienne, 60 agents par kilomètre de voie travaillent à l’exploitation du métro: combien seront-ils à Lausanne ? Il n’y aura pas de chauffeurs dans les véhicules, et la surveillance des stations se fera principalement par vidéo-surveillance: quelles conséquences cela aura-t-il sur la sécurité et le service aux usagers ? Des trois piliers de l’Agenda 21 que le parti vert promeut -l’économique, le social et l’environnement – force est de constater que seul le premier semble à ce jour avoir retenu l’attention de son magistrat. Si en l’espèce le citoyen ne s’inquiète pas pour sa situation de syndic le mieux payé de Suisse, le bilan de son action en faveur de Lausanne incite à moins de réjouissance. En tentant de faire passer au forceps le projet de city management, il a réuni la quasi-totalité des commerçants de la ville contre lui. Il faut dire que même la droite n’aurait osé proposer un projet aussi injuste. Monsieur le Syndic et Conseiller national a été élu sur un programme qui met en avant des propositions progressistes, en matière d’écologie et de social notamment. Ce n’est pas à Grenoble qu’il s’agit d’aller le défendre, mais hic et nunc, sur les bords du Léman. Ses électeurs auraient-ils été ? eux aussi ? candides’ Cela implique, il est vrai, de rompre avec le consensualisme vert pâle « ni de gauche, ni de droite » dans lequel son parti semble s’être engagé. Culpabiliser le citoyen, sommé de rattraper par son comportement écologique les dérives du néolibéralisme, ne mène à rien. Il n’y a pas d’écologie sans critique systémique. A moins que, à la conservation des ressources de notre planète, le syndic vert n’ait substitué celle de l’électorat de centre droit qui ne cesse, et pour cause, de venir grossir les rangs de son mouvement ? |

